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Réponses

01 - Travail échangé lors d'un dégagement gazeux (réaction chimique)

 

Question : Calculer le travail effectué par la réaction de 50 g de fer avec du chlorure d'hydrogène dans un bécher ouvert à 25 °C.

Données :

Fe(s) + 2 HCl(aq) donne FeCl2(aq) + H2(g).

Masse molaire du fer : 55,85 g/mol

Constante des gaz parfaits R=8,3145 J/K.mol

 

Réponse donnée dans Chimie Physique de Peter W. Atkins, de Boeck université, 6ème édition, exemple 2.1. page 54 :

Le gaz repousse l'atmosphère et donc w=-Pext * delta(V). Le volume initial peut être négligé car le volume final (après production de gaz) est très supérieur et delta(V)=Vfinal - Vinitial=Vfinal=nRT/Pext, n étant la quantité de H2 produit. Donc w=- Pext*nRT/Pext=-nRT.

1 mol de H2 est produite pour la consommation d'1 mol de fer. Comme on a 50/55,85 mol de fer on en déduit que l'on a n=50/55,85 d'où W=- 50/55,85 * 8,3145*(273,15 + 25)=-2,2 kJ

 

Le problème : lorsqu'un gaz s'échappe dans un environnement composé de gaz d'espèces chimiques différentes (air par exemple), il ne voit aucun opposant et se détend comme s'il se détendait dans le vide (bien que l'état stable soit plus lentement atteint que dans le vide) : il s'agit simplement d'une détente de type "Joule". Le gaz se détend jusqu'à ce que sa pression soit égale à celle de la pression de vapeur saturante si rien ne vient limiter son volume.On peut donc admettre que le H2 produit lors de la réaction chimique ci-dessus n'est pas soumis à la pression Pext de l'air qui est d'une espèce chimique différente (gaz composé de 78 % en volume de N2 et de 21 % de O2 pour l'essentiel). Ainsi, le H2  ne peut pas directement "repousser" l'atmosphère comme le dit Atkins, mais ne fait que "repousser" le H2 de l'air, qui possède une pression très faible (quasiment 0 Pa). H2 se dégage donc quasiment dans du vide (sous-entendu "de H2") : l'expansion du H2 est du type "expansion libre" et le travail échangé avec l'atmosphère est donc nul : pourquoi n'obtient-on pas un travail nul dans ce cas ? Où est donc l'erreur commise dans le raisonnement ci-dessus ?J'ai beaucoup cherché sur internet une explication, demandé à mes collègues chimistes, sans obtenir de réponse (beaucoup d'entre eux étaient d'ailleurs embarrassés car ils n'avaient jamais réfléchi à la question). Certains auteurs imaginent même une "surface" fictive posée sur le liquide du bécher et qui se déplace à l'instar d'un piston, voire qui "gonfle", lors de la production de H2...ça devient une construction de pensée qui fausse la réalité du dispositif et ne fait, de mon point de vue, qu'évacuer une question légitime.

 

Réponse. P. Atkins fait un raccourci. Le dihydrogène H2 se dégage à l'interface clou / HCl, donc dans le liquide HCl(aq) qui est soumis à la pression atmosphérique Pext (on néglige la profondeur du clou dans le liquide qui ne modifie pratiquement pas la pression vue par le H2). Il s'agit d'un phénomène volumique sous pression constante, comme l'ébullition de l'eau à 100 °C sous pression atmosphérique, et non d'un phénomène surfacique, tel que l'évaporation.

Le H2 se dégage donc à la pression Pext et garde cette pression tant qu'il reste dans le liquide (il possède donc un volume propre qui s'additionne au volume du système {clou, HCl(aq)}). Dans ce cas il perd le travail W1=-2,2 kJ calculé plus haut...tant qu'il reste dans le liquide. 

Arrivé à l'air libre, le H2 voit sa pression s'annuler, il n'a plus de volume propre et n'échange plus de travail (expansion libre d'un gaz dans le vide) : W2=0. Lors de son parcours entier (c'est-à-dire du liquide HCl(aq) vers l'atmosphère extérieure) le H2 échange alors le travail total W=W1 + W2=- 2,2.10^3 + 0=- 2,2 kJ. Ce qui est bien le résultat annoncé. Noter que si l'on "coiffe" le clou d'une éprouvette renversée pour récupérer le dihydrogène, le volume obtenu dans l'éprouvette est égal au volume produit précédemment par l'ensemble des bulles soumises à la pression atmosphérique (le bain liquide étant implicitement soumis à la pression atmosphérique), donc avec échange d'énergie sous forme du travail W1 également.

En chimie on parle "d'enthalpie de réaction" pour parler de chaleur échangée avec l'extérieur lors d'une réaction chimique, car les réactions (dégagement gazeux inclus) s'effectuent généralement dans des liquides soumis à la pression atmosphérique : le gaz dégagé est donc soumis à la pression atmosphérique qui est constante. Il s'agit finalement de chaleur dégagée à pression constante, c'est à dire d'enthalpie (ou plutôt de différence d'enthalpies).

 

On peut donc conclure, avec ce problème, qu'en réalité le H2 "repousse" le liquide HCl(aq) (je préfère dire "voit comme opposant extérieur"), qui lui-même "repousse" l'atmosphère (à l'instar des pistons hydrauliques qui transmettent les pressions). Tout se passe effectivement comme si une membrane mobile (ou un piston) était posée à la surface du liquide et coulissait sous l'effet de l'augmentation de volume du système {Clou, HCl(aq), Gaz H2}, ou comme si le gaz H2 "repoussait", in fine, directement l'atmosphère. Cela méritait une explication...

01 - travail échangé lors d'un dégagement

02 - Chaleur Q évaluée par un diagramme entropique S(T) - Equilibre, réversibilité et quasi-staticité

 

Question : pourquoi évaluer la chaleur Q développée lors d'une transformation quelconque grâce à un diagramme entropique T(S) ou S(T) qui, en toute rigueur, n'est valable que pour une transformation réversible puisque TdS=dQ uniquement pour les transformations réversibles ?

 

Réponse. Cette discussion ne fait pas parti des thèmes abordés dans les cours d'initiation de ce site (qui sont uniquement des cours d'initiation, rappelons-le). En effet, le sujet n'est pas simple et, dans ses détails, exige des définitions mathématiques relativement poussées. 

 

Il s'agit ici du point critique de la thermodynamique : il y a autant de définitions des concepts "chaleur", "travail", "équilibre" ou encore "quasi-statique" qu'il y a d'auteurs pour en parler. D'autant plus que les auteurs spécialistes ne prennent pas souvent le soin de définir avec suffisamment de précision et de rigueur les concepts qu'ils utilisent. Quand, cependant, ils le font, ils ne prennent pas souvent le soin d'attirer l'attention sur les subtilités des définitions adoptées et ce qu'elles excluent (par exemple, pour certains auteurs, une réaction chimique implique la présence de travail, alors que pour d'autres cela implique la présence de flux chimique dont le travail est exclu). Du coup les relations physiques exposées deviennent inexploitables pour le profane, car leur domaine de validité est trop flou, donc dangereux à utiliser. Pour s'en rendre compte il suffit de lire les ouvrages de thermodynamique (j'en ai environ 15 chez moi, qui ne suis pas spécialiste, et je ne mentionne pas les articles scientifiques) : aucun auteur ne donne la même définition des concepts, pourtant de base, de la thermodynamique. Il faut alors même devenir spécialiste pour comprendre l'auteur (la spécialisation étant nécessaire pour comprendre les subtilités des différentes définitions)...mais dans ce cas, à qui s'adresse l'ouvrage qu'il a écrit ? La lecture des articles scientifiques publiés dans le Bulletin de l'Union des Physiciens (BUP), donnés en liens sur la page Bibliographie de ce site, sont éloquents. Cela ne pose pas de problème lorsque chaque auteur, ou professeur en classe, est "auto-cohérent", c'est-à-dire quand sa technique de résolution des exercices donne les résultats admis par la communauté scientifique. Cela l'est beaucoup plus lorsque les exercices sont proposés dans des sujets d'examens nationaux : ainsi peut-on lire, dans le concours Polytechnique 2004 option TSI, qu'une détente de Joule Gay-Lussac est réalisée de façon "quasi-statique" comme on va le préciser ci-dessous, alors que d'autres spécialistes (H.B. Callen par exemple) affirment que cette détente n'est jamais quasi-statique. La correction de l'épreuve dépend alors du spécialiste qui la rédige / corrige et de la "chapelle" à laquelle il appartient. Le professeur qui doit préparer ses élèves aux différents sujets de concours se trouve confronté au maniement de concepts et de méthodologies différentes, voire contradictoires. Cette situation est évidemment très "inconfortable".

 

On peut illustrer ce problème de contradiction par l'exemple suivant : un sujet d'étude "détente de Joule Gay-Lussac d'un gaz parfait, réalisée de façon quasi-statique" est proposé dans l'ouvrage "Cap Prépa 1ère année, Physique MPSI-PCSI-PTSI", éditions Pearson Education et co-écrit par des spécialistes de thermodynamique. La détente de Joule Gay-Lussac est une transformation très simple (on détend un gaz parfait à travers un petit trou, dans une enceinte où sa pression initiale est plus faible, voire dans le vide). Dans cet ouvrage, on peut lire p.726 que pour toute transformation quasi-statique on a dQq.s = T.dS, avec T la température du thermostat en contact avec le système et Qq.s. la chaleur échangée de façon quasi-statique entre le système et l'extérieur. Comme dQq.s. = 0 pour une détente de Joule Gay Lussac (gaz parfait sans échange thermique avec l'extérieur) on en déduit que la variation d'entropie du gaz parfait est nulle, ce qui est faux (car la détente de ce système isolé n'est pas réversible).

En fait, dans le même ouvrage, on utilise deux définitions différentes de la "quasistaticité" d'un processus, à savoir "succession continue de processus élémentaires pour un système en quasi-équilibre thermodynamique interne" ou "succession de processus élémentaires pour un système en quasi-équilibre thermodynamique interne" : l'adjectif "continu" a disparu de cette deuxième définition. La détente de Joule Gay-Lussac peut être qualifiée de "quasi-statique" avec la deuxième définition, mais elle ne peut pas l'être avec la première définition (les états intermédiaires observés entre deux états d'équilibre voisins ne sont pas définis : les états d'équilibres voisins ne sont donc pas continus). Or la relation dQq.s. = T.dS est valable pour la première définition seulement (succession continue...) d'où l'incohérence observée. On observe là l'importance fondamentale d'une définition précise et les subtilités qu'elle implique. L'article "sur la distinction transformations quasistatiques / transformations réversibles en thermodynamique élémentaire" du BUP spécial Cahier enseignement supérieur de juin 1995 illustre également le problème de concepts mal formulés, voire inutiles. 

 

Certains spécialistes contournent la difficulté : pour H.B. Callen (Thermodynamics and an introduction to thermostatistics, second edition, John Wiley & Sons), une transformation est dite "quasi-statique" si l'on a dQ = T.dS. Ainsi, puisqu'on n'a jamais dQ = T.dS avec la détente de Joule Gay-Lussac (problème 4.2.3. p.99) c'est que cette transformation n'est jamais quasi-statique (contraposée de la définition). Mais cela pose le problème de l'élève pour lequel la reconnaissance de la quasi-staticité d'une transformation est un préalable à l'évaluation de la chaleur échangée : comment peut-il savoir que la transformation étudiée est quasi-statique pour appliquer la relation dQq.s. = T.dS ? En outre, Qq.s est définie comme un transfert énergétique particulier entre le système et l'extérieur, qui s'effectue par conduction, rayonnement , convection ou changement de phase ; dans ce cas : qu'est-ce que "l'échauffement" provoqué par un frottement interne de piston contre une paroi calorifugée, lors de la détente d'un gaz ? Est-ce un transfert compté comme de la chaleur (de signe opposé au travail des forces de frottement) ? Mais ce ne peut pas être de la chaleur puisque c'est une énergie qui reste interne au système, sans être échangée avec l'extérieur...on aborde là un problème de définition classique qui fait régulièrement débat (voir les articles du B.U.P. sur la page Bibliographie de ce site).

 

Il faut néanmoins remarquer que l'évaluation de la variation d'entropie d'un processus à partir de la relation dS = dQ/T ne pose pas de problème car il suffit d'évaluer dQ sur un chemin réversible fictif (partant du même état initial et aboutissant au même état final que le processus réel étudié) pour en déduire la différentielle dS puis la variation de S (qui est une fonction d'état, pour laquelle, par définition, la variation ne dépend pas du type de chemin suivi). La chaleur développée Q ne doit être perçue, dans ce cas, que comme un intermédiaire de calcul sans interprétation physique particulière. Le diagramme entropique est inutile.

 

En conclusion, la détermination de Q à partir de la relation dQ = T.dS (ou à partir d'un diagramme entropique) doit être évitée car le domaine d'application de cette relation dépend de l'auteur qui s'y réfère : est-ce que T  - température de contact à l'interface système / thermostat - est la température de la paroi intérieure du système ou de sa paroi extérieure lors du contact avec la source ? Est-ce que le système a d'ailleurs une épaisseur de paroi (hypothèse fondamentale pour les auteurs Cengel & Boles, dans laquelle beaucoup de causes d'irréversibilité apparaissent) ? Qu'est-ce que Q : un échange énergétique complémentaire du travail vis-à-vis de l'énergie interne ou un échange énergétique particulier avec l'extérieur, où l'intérieur du système n'est pas pris en compte ? Est-ce que Q prend également en compte la chaleur qui reste interne au système (dégagée par frottements lors d'une détente adiabatique par exemple, telle qu'on la définit en thermodynamique technique) ? Mais a-t-on le droit de parler de travail ou de chaleur interne à un système, alors que ces notions ne sont définies que pour l'opérateur humain extérieur qui contrôle ces types d'échanges énergétiques uniquement à l'interface système / extérieur ? Qu'est-ce que la "quasi-staticité" d'un processus (est-ce un processus réversible, tel que la définit H. Lumbroso p.123 de son ouvrage "thermodynamique" où "l'extérieur" n'intervient pas) ? Qu'est-ce qu'un équilibre thermodynamique : est-ce un équilibre (uniformité des variables d'état) qui évolue conjointement avec l'extérieur du système ou seulement un état stationnaire et uniforme interne au système, où l'évolution de l'extérieur n'intervient pas ? Toutes ces questions nécessitent des heures et des heures de lecture, des heures et des heures de travail acharné pour être comprises, sinon tranchées.

 

Personnellement ma définition la plus simple de l'équilibre thermodynamique consiste à affirmer qu'un système est "à l'équilibre thermodynamique" (sous-entendu "interne") si, en l'isolant brutalement de tout échange énergétique avec l'extérieur (on l'enferme d'une enveloppe fermée, rigide et adiabatique), ses variables d'état restent stationnaires (constantes dans le temps), qui est la définition qu'en donne J.P. Pérez ("leçons de physique , une approche moderne" 2011, chapitre 27, p.693). L'équilibre pouvant n'être que local (on enferme seulement une partie du système dans l'enveloppe précédente) pour autoriser une évolution temporelle, on parle alors de "quasi-équilibre". Je me tiendrai aussi ici à la définition pratique de la quasi-staticité d'un processus = "succession continue d'états de quasi-équilibre interne", où la relation Q = T.dS peut être appliquée avec Q la chaleur échangée avec le milieu extérieur et T la température de la surface interne du système : un processus quasi-statique est un processus que l'on peut représenter dans un plan énergétique (T, S) ou (P, V). La détente de Joule Gay-Lussac ne peut pas se représenter dans de tels plans : elle n'est pas quasi-statique. Attention, bien que la transformation de Joule Gay-Lussac d'un gaz parfait ne soit pas quasi-statique (avec cette définition) on peut cependant écrire dU = T.dS -P.dV (pour un système thermodynamique représentable par 2 variables indépendantes : P, V - P, T ou V, T). Cela paraît étrange, mais il faut comprendre que dU est une différentielle totale, qui ne dépend donc pas du type de processus élémentaire qui la réalise. Ainsi, bien que P (ou V d'ailleurs) ne soit pas défini entre les deux états d'équilibres séparés par dU, on peut quand même écrire P = nRT/V qui laisse supposer que le processus est une suite continue d'état d'équilibre entre deux états d'équilibre séparés par dU alors que ce n'est pas le cas (P et V n'étant pas mesurables ou "définis", bien que la transformation soit élémentaire ou "infinitésimale"). Il faudra cependant éviter d'attribuer une signification physique quelconque à T.dS et -P.dV (par exemple énergie échangée avec l'extérieur sous forme de chaleur et de travail) qui ne sont, en réalité, que des intermédiaires de calcul permettant de calculer dU, à l'instar de Q dans la relation  dS = dQ/T d'une transformation réversible qui permet de calculer la variation réelle de S à partir d'une chaleur Q fictive. Ainsi, pour la détente de Joule Gay-Lussac on a dU = dQ + dW = 0, d'où 0 = TdS - PdV, d'où dS = P/T.dV et puisque P = nRT/V pour un gaz parfait en équilibre interne on obtient dS = nRdV/V, c'est-à-dire delta S = nR.ln(V2/V1) pour ce processus non quasi-statique.

02 - Chaleur Q évaluée par un diagramme
03 - Rendement du moteur de Stirling

03 - Rendement du moteur de Stirling

 

Question : pourquoi le rendement du moteur de Stirling est-il maximal (= 1 - T1/T2 avec T1 la température, en kelvin, de la source froide et T2 la température de la source chaude) alors qu'il s'agit d'un moteur ditherme différent d'un moteur qui évolue sur un cycle de Carnot. Comme il ne s'agit pas d'un cycle de Carnot - seul cycle ditherme réversible -  son rendement devrait être inférieur au rendement maximal.

 

Réponse. Le moteur de Stirling est présenté ci-dessous (il illustre également l'en-tête de ce site internet) :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le principe d'un moteur thermique est simple : on chauffe un gaz qui, sous l'effet de l'augmentation de température, se détent et pousse un piston. Ce piston, grâce à un système bielle / manivelle, transforme la translation du piston en une rotation de roue. La roue faisant office de volant d'inertie, le piston est repoussé par inertie à sa position initiale. Mais le gaz étant comprimé, sa pression s'oppose à la rotation de la roue : il faut donc enlever la source chaude puis la remplacer par une source froide pour refroidir le gaz : la pression faiblit et s'oppose finalement faiblement au retour du piston. Le cycle recommence périodiquement.

 

Cette méthode est simple, mais a pour inconvénient de chauffer et refroidir le cylindre au lieu de directement chauffer et refroidir le gaz : le rendement énergétique n'est pas très bon. Tout l'art du concepteur d'un moteur thermique est d'obtenir le maximum de travail en un minimum de temps (pour assurer une puissance élevée) en utilisant le minimum de ressource énergétique (source chaude qui fournit Q2) mais en assurant aussi le minimum de pertes de chaleur entre le gaz et son milieu extérieur (sources de chaleur, cylindre). Dans le cas du moteur Stirling, c'est le gaz que l'on va déplacer dans un cylindre, et non les sources de chaleur : on ne va donc pas perdre d'énergie à chauffer puis refroidir périodiquement un cylindre puisque c'est le gaz qui se déplace périodiquement de la partie chaude à la partie froide et réciproquement. Le rendement est donc amélioré.

 

Raisonnons alors sur l'image gif de gauche où le système bielle / manivelle est plus aisé à comprendre que sur l'image de droite : lorsque le piston gris est pratiquement en début ou en fin de course, une rotation d'un quart de tour ne modifie pratiquement pas sa course, donc le volume de gaz : la transformation est quasiment isochore. On a donc deux transformations idéalement isochores lorsque le piston est pratiquement en début puis en fin de course. 

Cependant, on a placé un deuxième système bielle / manivelle à la roue : ce deuxième système bielle / manivelle transforme la rotation de la roue en la translation d'un déplaceur (vert sur l'image gif de droite). Le déplaceur est un cylindre plein muni d'ouvertures qui laissent passer le gaz lors de son déplacement, ce qui ne provoque donc aucune compression ou détente du gaz lors de sa progression (il n'effectue aucune transformation du gaz) : il ne fait que déplacer le gaz de la partie froide du cylindre à la parte chaude, et inversement.

 

L'idée de génie consiste à remarquer qu'en plaçant la manivelle du déplaceur à 90° de la manivelle du piston, une rotation de la roue provoque sur le déplaceur l'exact opposé de ce qu'elle provoque sur le piston : quand le piston se déplace lentement alors le déplaceur se déplace rapidement, et inversement quand le piston se déplace rapidement (en milieu de course) alors le déplaceur se déplace lentement (il est en début ou en fin de course). On dit que le déplaceur et le piston fonctionnent "en quadrature de phase". Le déplaceur est actionné en avance d'un quart de tour (90°) sur le piston. Ainsi, quand les transformations sont isochores (le piston bouge peu), le déplaceur bouge beaucoup et le gaz entre en contact avec la source froide puis avec la source chaude : il se refroidit puis il s'échauffe. Ces transformations isochores sont irréversibles car le gaz n'est pas en équilibre thermique avec les sources de chaleur.

 

Lorsque le piston est en milieu de course il se déplace rapidement, le déplaceur bouge donc forcément lentement : le gaz reste idéalement à sa position sans être déplacé et s'échauffe en contact avec la source chaude tout en se détendant sous l'effet de la pression : son volume augmente (son barycentre reste quasiment en place). L'augmentation du volume du gaz repousse le piston (c'est la phase motrice du cycle). Cette transformation s'opérant sans déplacement d'ensemble du gaz (pas de mouvement de son barycentre), on peut la considérer idéalement comme étant isotherme car il y a idéalement équilibre de la température du gaz avec la température de la source chaude. Cette transformation est réversible. On a évidemment deux transformations isothermes (contacts avec la sources chaude puis la source froide) qui durent approximativement chacune "un quart de tour". Le cycle n'est pas réversible du fait de la présence des isochores, mais le rendement énergétique est amélioré part rapport à un système sans déplacement du gaz.

 

Une deuxième idée de génie apparait : du fait que les transformations isochores ne sont pas réversibles (puisque le gaz n'est pas en équilibre thermique avec les sources) on va les rendre réversibles en modifiant le milieu extérieur vu par le gaz. Cette réversibilité assurera un rendement maximal, idéalement égal au rendement d'un cycle de Carnot.

Pour cela on va "faire croire" au gaz qu'il est en équilibre thermique avec l'extérieur en faisant jouer un rôle d'échangeur de chaleur au déplaceur. Cet échangeur de chaleur consiste simplement à utiliser son inertie thermique : le gaz n'entre plus brutalement en contact avec les deux sources thermiques mais y entre "progressivement", en douceur. En effet la température du gaz va évoler lors de sa progression dans l'échangeur, qui idéalement évolue à la même température que le gaz. L'échangeur joue donc le rôle de système extérieur au gaz avec lequel il est idéalement en équilibre thermique : la réversibilité est assurée, on a une transformation "infinitherme" où l'échangeur joue le rôle d'une infinité de sources thermiques extérieures, de température infiniment voisines les unes des autres.

Si l'on considère que le système gaz n'échange de chaleur qu'avecl'échangeur lors des transformations isochores, cela signifie implicitement que les isochores sont calorifugées vis-à-vis des sources de chaleur : on a donc un cycle réalisé par 2 transformations isothermes puis deux transformations "adiabatiques" (au sens qu'aucune chaleur n'est échangée avec les sources) : on en revient à un cycle de type Carnot, avec le rendement maximal (rendement de Carnot) qui en découle, à savoir 1- T1/T2.

 

Cependant l'échangeur de chaleur échange de la chaleur avec les sources (au moins dans la phase non stationnaire de démarrage du cycle, pour chauffer l'échangeur) et n'est pas parfaitement calorifugé : l'énergie finalement fournie par la source chaude au système {gaz + échangeur} reste plus élevée que celle donnée au système {gaz} seul et le rendement énergétique doit prendre en compte cette "sur-consommation" de l'échangeur si l'on veut dimensionner la ressource énergétique (la source chaude Q2). En fin de compte le rendement maximal 1-T1/T2 est un rendement théorique qui ne reflète qu'une partie de la réalité en ne prenant pas en compte la consommation de l'échangeur. En pratique le rendement est même plus faible que 1 - T1/T2 car les transformations ne sont pas parfaitement totalement réversibles : l'échangeur n'est jamais strictement à la même température que le gaz et, de surcroît,  le piston "déplaceur / échangeur thermique" est même parfois absent pour ne laisser place qu'à un piston déplaceur, sans assurer l'échange thermique. Ce moteur est brièvement étudié dans le document discussion sur le second principe de la thermodynamique. Remarquer que Cengel et Boles assurent qu'il existe seulement trois cycles idéaux dithermes théoriquement réversibles : le cycle de Carnot, le cycle de Stirling et le cycle d'Ericsson. Ces deux derniers cycles possèdent des échangeurs de chaleur (le premier à volume constant et le deuxième à pression constante) qui imitent une source "infini-therme" et qui, idéalement, n'échangent aucune chaleur avec l'extérieur. G. Dareau et Rousselet ("Thermodynamique" 2ème année PT-PT*, Ellipses) assurent qu'il n'existe qu'un seul cycle ditherme réversible : le cycle de Carnot. Pour ces derniers auteurs, le cycle de Stirling n'est pas un cycle ditherme car l'échangeur de chaleur fait parti de l'extérieur du système : il s'agit d'un cycle "infini-therme" (néologisme personnel). Il ne fait donc pas parti des processus dithermes réversibles. En revanche, pour Cengel & Boles, l'échangeur de chaleur fait parti du système étudié et donc le système {gaz + échangeur} est bien en contact avec un extérieur ditherme : le processus est bien ditherme réversible. On voit bien là la nécessité de définir avec précision le contour des systèmes étudiés (ce que n'ont pas fait les auteurs de ces ouvrages...personne n'est parfait).

Moteur Stirling (type bêta)

Moteur Stirling (type bêta). Source : wikipedia

04 - Eléments, atomes et molécules

 

Question : on a beaucoup de mal, quand on commence par étudier la chimie, à distinguer les notions d'élément et d'atomes. Un élément représente le nom attribué à tous les atomes ou ions qui possèdent le même nombre de protons mais pas forcément le même nombre de neutrons. Bien, cependant voilà une application flash qui représente le tableau périodique des éléments (source : http://www.cite-sciences.fr/archives/francais/ala_cite/expo/tempo/aluminium/science/mendeleiev/mendeleiev.swf) :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L'hydrogène H est, dans ce tableau, classé en tant que "gaz". C'est un problème car l'hydrogène n'est pas un corps particulier : a-t-on déjà vu du gaz hydrogène H dans la nature ? Ou même fabriqué artificiellement ? Non, ce qui existe dans la nature est l'hydrogène combiné à d'autres éléments, comme l'eau (H20), ou bien simplement le dihydrogène H2. Qu'est-ce donc ce "gaz" dont le nom est H ? De même quel est ce gaz oxygène O ?

 

Réponse. C'est une erreur fréquemment observée (malheureusement également rencontrée dans les remarquables ouvrages d'Eugène Hecht et même sur le site de la cité des sciences !) : malgré ce qu'affirme la Cité des Sciences (confirmé quand on clique sur l'élément H pour avoir des informations précises) l'hydrogène n'est pas un gaz, c'est un élément qui ne possède pas une nature "gaz", "solide" ou "liquide" en lui-même (qui sont des propriétés d'ensemble d'atomes, ions ou molécules dont la cohésion de l'édifice est assurée par des liaisons métalliques, covalentes, ionique, Van der Waals ou hydrogène dépendant de la pression et de la température) mais un élément incorporé dans des espèces chimiques diverses (H20, H2...). Cependant l'hydrogène se trouve le plus fréquemment rencontré sous forme d'une molécule (assemblage d'atomes) de gaz, du moins dans les conditions standards de température et de pression : c'est le dihydrogène H2. On attribue donc, ici et à tort, la nature "gaz" à l'élément H. Cette classification "solide", "liquide" et "gaz" est de nature à induire en erreur : il ne faut pas l'utiliser car elle fait l'amalgame entre "élément" et "molécule". De même l'élément Chlore Cl est classé ci-dessus comme "gazeux" : il y a encore confusion entre la molécule de dichore Cl2 et l'élément chlore Cl, de même qu'il y a confusion entre la molécule de dioxygène O2 (sous forme de gaz dans les conditions standards) et l'élément oxygène. Je recommande donc une classification différente des éléments du tableau périodique et propose une autre classification (par exemple "métaux", "non métaux" et "gaz rares" qui ne s'associent jamais en molécules), à l'exemple du tableau au format flash ci-dessous (source : http://touchspin.touchspin.com/). Remarquer que, dans ce tableau comme dans le précédent (et comme dans la plupart des sites internet) le Lanthanium (La, 57) et l'actinium (Ac, 89) sont classés dans le bloc f du tableau périodique alors qu'ils n'ont aucun électron dans la sous-couche f, c'est une erreur fréquente : le lanthanium et l'actinium appartiennent au bloc d (en jaune ci-dessous) et non au bloc f (en vert).

04 - Eléments, atomes et molécules
05 - Injecteurs et diffuseurs Venturi

05 - Injecteurs et diffuseurs Venturi

 

Question : La thermodynamique a parfois partie liée avec l'hydrodynamique. Pourquoi le fait de pincer l'extrémité d'un tuyau d'arrosage permet d'augmenter la vitesse (ou la portée) d'un jet ? En effet la vitesse ne dépend pas de la section de sortie du jet (en l'absence de pertes de charge) : v=(2*P/µ)^1/2 avec µ la masse volumique de l'eau et P la pression statique effective (c'est-à-dire la pression relative mesurée dans le tuyau buse fermée). La vitesse est donc indépendante de la section de passage de l'eau : le fait de pincer l'extrémité ne devrait pas modifier la portée du jet. Plus techniquement parlant, pourquoi dit-on qu'un "injecteur",  une "buse" ou encore une "tuyère" (c'est-à-dire un simple cône convergent) placé au bout d'une conduite permet d'augmenter la vitesse du fluide puisque la vitesse est indépendante de la section de passage du fluide en l'absence de pertes de charge, donnée par la formule de Torricelli v=(2*g*h)^1/2 avec h la hauteur de chute d'eau et g l'accélération de la pesanteur, v est la vitesse "de chute libre".

Des "experts" rencontrés sur les forums internet de physique affirment souvent que c'est dû à la loi de conservation du débit du régime permanent : "lorsque la section S diminue la vitesse v augmente car le produit S x v (=débit) est constant par la loi de conservation du débit"...seulement voilà : le débit n'est pas constant lorqu'on ajoute un injecteur ou un diffuseur (injecteur inversé) à l'extrémité du conduit : il diminue en présence d'un injecteur et augmente en présence d'un diffuseur.

 

Dans le même esprit, pourquoi dit-on qu'un diffuseur Venturi (cône divergent) permet de réduire la vitesse de sortie de l'eau, alors qu'elle est toujours donnée par la formule de Torricelli en l'absence de pertes de charge (vue précédemment), donc indépendante de la section de sortie du cône ?

 

Réponse. Les gens qui affirment que c'est l'illustration de la loi de conservation du débit manquent de rigueur, car le débit ne reste pas constant lorsqu'on place un injecteur ou un diffuseur à l'extrémité d'une conduite : ces gens confondent "conservation" du débit (qui reste bien conservé à travers chaque section d'un tube d'écoulement) et "constance" du débit (qui varie selon les conditions d'écoulement). Les différences de vitesse observées lorsqu'on modifie la section de sortie sont, en réalité, dues aux pertes de charge : un injecteur diminue la vitesse du fluide dans la conduite, donc diminue les pertes de charge (énergie thermique) dans la conduite, ce qui se traduit par l'augmentation d'énergie cinétique par conservation de l'énergie (1ère loi de la thermodynamique) : la vitesse de sortie du jet augmente par rapport à la vitesse observée sans pincement de l'extrémité (mais reste toujours inférieure à la vitesse de chute libre, c'est-à-dire sans pertes de charge).  Les détails de la démonstration sont exposés dans le document Injecteurs et buses et les résultats qui prennent en compte la présence des pertes de charge sont issus du logiciel Mecaflux Pro-3D. Les générateurs de pression utilisés (château d'eau par gravité, pompes de distribution d'eau avec régulation de pression) sont tels que la variation de pression statique en sortie du générateur ne dépend pas de la variation de débit (ce qui est le cas de la plupart des applications courantes pour les débits mis en jeu où la puissance nominale est largement supérieure à la puissance restituée). Dans le cas contraire la nature de la pompe (puissance, caractéristique Q,P) a une influence significative sur la portée du jet : dans le cas du réseau d'eau domestique par exemple, alimenté par un réseau public (pompes de puissance nominale largement supérieur à la puissance exigée par l'utilisateur individuel), le débit Q est pratiquement constant quelle que soit la perte de charge créée par un pincement (dans la limite du raisonnable, limite qui dépend des pompes) car le point de fonctionnement est situé sur partie verticale de la caractéristique (Q débit, P pression) de la pompe additionnée aux pertes de charge dues aux longueurs importantes (des km) des conduits utilisés : le débit Q observé reste approximativement constant malgré un pincement de l'extrémité : la vitesse d'éjection (donc la portée) est donc augmentée par le pincement.

Pressions, vitesses et débit en l'absence d'injecteur (mais rétrécissement en fin du conduit pour  éviter la cavitation)

Pressions, vitesses et débit en présence d'injecteur (= "buse" ou "tuyère") ou encore "effet d'un pincement de tuyau d'arrosage"

Pour observer l'influence des pertes de charge on peut remarquer que la hauteur du jet vertical d'un tuyau d'arrosage augmente lorsqu'on monte sur une échelle : elle resterait inchangée en absence de pertes de charge et égale à h = P/(µ.g) avec P la pression effective statique (mesurée buse fermée) et µ la masse volumique de l'eau. Cette hauteur ne dépend pas de l'altitude à laquelle est perché l'arroseur !

 

Au contraire d'un injecteur, un diffuseur Venturi crée malheureusement (ce n'est pas voulu) des pertes de charge supplémentaires dans la conduite, car il augmente le débit du fluide qui se traduit par une augmentation de la vitesse dans la conduite. Ces pertes de charge se traduisent par une augmentation de l'énergie thermique du fluide, donc par une diminution de son énergie cinétique en sortie du diffuseur. L'intérêt du diffuseur Venturi se situe dans l'augmentation du débit par élargissement de la section de sortie du jet, et non par augmentation de sa vitesse (ou d'énergie cinétique) car cette dernière resterait inchangée en l'absence de pertes de charge. Le document Diffuseur Venturi illustre ce propos.

Pressions, vitesses et débit en l'absence de diffuseur Venturi

Pressions, vitesses et débit en présence de diffuseur Venturi

06 - Détente de Joule Gay Lussac infiniment lente

06 - Détente de Joule - Gay Lussac infiniment lente

 

On prend une enceinte rigide de volume V2 et calorifugée que l'on sépare en deux compartiments rigides. La détente de Joule-Gay Lussac consiste ici à enfermer un gaz parfait dans un des deux compartiments (de volume V1) puis à pratiquer un trou de taille infinitésimale (pour obtenir une transformation quasistatique) qui communique avec le deuxième compartiment initialement vide (ou rempli d'un gaz d'une espèce chimique différente) : la détente du gaz est isotherme (car dU = dQext + dWext = 0 + 0 = 0 or dU = cste * dT pour un gaz parfait donc dT = 0) et le volume du gaz varie de V1 à V2. La détente est également adiabatique puisque la chaleur Qext échangée avec le milieu extérieur est nulle.

Problème : cette détente est isotherme ou adiabatique ? Si elle est isotherme la pression obéit à la loi P = nRT/V et le point figuratif de la détente dans le plan P(V) se déplace sur une hyperbole. Si elle est adiabatique la pression obéit à la loi PV^(gamma) = Constante et le point figuratif de la détente dans le plan P(V) se déplace sur une courbe différente de l'isotherme. Le point figuratif ne peut pas se déplacer sur deux courbes différentes à la fois...il y a donc un paradoxe.

 

Réponse. La détente de Joule - Gay Lussac nous réserve toujours bien des surprises  ! Considérons le système {gaz contenu dans le compartiment de volume V1} cette transformation ne peut pas être représentée dans un diagramme de Clapeyron P(V) car il ne s'agit pas d'un système fermé, on peut la représenter dans un diagramme de Watt P(V) et la transformation apparaît alors comme isochore (...par saut infinitésimal, voir question 07 suivante) et on ne peut pas alors utiliser le premier principe de la thermodynamique, valable pour un système fermé, pour en déduire W ou Q. Ce n'est donc pas parce qu'une transformation est infiniment lente qu'elle est forcément quasistatique, contrairement à ce que croient beaucoup de gens. Cette détente est loin d'étre évidente comme le montre l'article de Wikipedia discussion sur la détente de Joule-Gay Lussac.

07 - Détente "quasistatique" de Joule - Gay Lussac et variation d'entropie

 

On reprend l'expérimentation précédente mais on divise le deuxième compartiment vide en un très grand nombre de sous-compartiments de volumes dV << V1. Chaque sous-compartiment est percé d'un trou de taille infinitésimale à des dates successives, de sorte que le volume de gaz passe très progressivement de V1 à V1+dV etc...jusqu'à atteindre le volume finale V2. Cette détente est donc quasi-statique (chaque volume intermédiaire est parfaitement défini) et isotherme. Lors d'une détente élémentaire, le gaz voit son énergie interne varier telle que dU=TdS - PdV d'où dS=dU + P/T.dV or dU=0 (gaz parfait sur une transformation isotherme) d'où dS=P/T.dV. Comme P=NRT/V pour un gaz parfait on en déduit que dS=NR.dV/V. Ce raisonnement appliqué à toutes les détentes infinitésimales nous amène à affirmer que la variation d'entropie Delta(S) entre l'état initial de gaz (P1, V1, T) et l'état final (P2, V2, T) vaut Delta(S)=NR*ln(V1/V2).

Bien, cela nous amène encore une fois à un problème : on a une transformation quasistatique puisque chaque point intermédiaire de la détente est un point d'équilibre thermodynamique (état stable). On a donc la relation dQ=TdS (valable pour toutes les transformations quasistatiques). Or dQ=0 (pas de transfert thermique interne car la transfo est isotherme sans contact thermique avec l'extérieur, de même il n'y a pas de transfert thermique externe car l'enceinte est adiabatique) d'où dS=dQ/T=0 c'est-à-dire Delta(S)=0 et non Delta(S)=NR*ln(V1/V2) : il y a donc deux résultats différents qui s'affrontent. Où est l'erreur de raisonnement ?

07 - Détente quasistatique de Joule Gay Lussac

Réponse. La détente de Joule - Gay Lussac n'est pas quasi-statique au sens de "évolution quasi-statique = évolution continue sur le lieu des points d'équilibre interne stable". A forciori elle est non réversible. Elle est élémentaire ou infinitésimale (c'est-à-dire pouvant être décrite par des différentielles du genre dU = PdV + TdS ou encore par une écriture aux dérivées partielles dU = (dU/dT)V.dT + (dU/dV)T.dV ), mais elle n'est pas continue pour autant. Cette discussion a été abordée dans Thermodynamics and a introduction to thermostatistics, par Callen, problème 4.2.3. p. 99 - (voir la bibliographie sur ce site). La non quasi-staticité est prouvée par le fait que l'on n'a finalement pas dQ=TdS (contraposée de : "{quasi-statique} implique {dQ=TdS}", d'où "non {dQ=TdS} implique non {quasi-statique}").  Remarquer que Callen suggère, pour cette dernière transformation, que dU = TdS - PdV alors qu'elle n'est pas quasi-statique : il s'agit pourtant de la définition de la quasi-staticité adopté par Rémi (Thermodynamique, éditions Belin). Callen invalide donc la proposition présentée sur Wikipedia  discussion sur la détente de Joule - Gay LussacDécidément, la détente de Joule - Gay Lussac, toujours évoquée dans les ouvrages de thermodynamique mais rarement décryptée, est toujours surprenante car les spécialistes ne prennent pas souvent le temps de définir avec suffisamment de précision les concepts mis en jeu et essayent d'imposer implicitement leur point de vue !

08 - Energie interne

08 - Que sont "l'énergie" et "l'énergie interne" ?

 

L'énergie interne de n moles de gaz parfait monoatomique à la température T vaut U = 3/2.n.R.T avec R = 8,31 J.K^-1.J^-1 (modèle des gaz rares parfaits par exemple). Cela signifie que lorsqu'on s'approche de T = 0 K, U tend vers 0. Bien, mais Cengel et Boles, dans "Thermodynamique, une approche pragmatique", éditions Chenelière - Mc Graw Hill - De Boeck, affirment p.43 de leur ouvrage que U est la somme de l'énergie cinétique microscopique, de la chaleur latente (énergie de changement de phase), de l'énergie chimique (énergie d'interaction atomique entre noyau et électrons) et de l'énergie nucléaire (énergie de cohésion du noyau). En suivant cette définition de U on ne peut pas avoir U = 3/2.n.R.T car cela signifierait que le gaz parfait s'anihile (se détruit, disparaît) au fur et à mesure que T descend vers 0 K...ce ne peut donc plus être un gaz parfait. Il y a incohérence entre la relation U = 3/2.n.R.T et la définition de U qu'en donnent Cengel et Boles. Où est l'erreur de raisonnement ?

Réponse. Un jour que je me faisais inspecter, l'inspecteur a été surpris de ma définition de l'énergie : "l'énergie est une quantité mathématique sans signification physique particulière mais qui a la propriété essentielle de se conserver. Si elle ne se conserve pas, c'est qu'on a découvert une autre forme d'énergie (et on la prend en compte pour que la loi soit à nouveau respectée)...ou que l'on a commis une erreur dans le bilan énergétique" : c'est le principe de conservation de l'énergie (postulat qui ne se démontre pas et qui constitue la première loi de la thermodynamique). Cet inspecteur pensait que l'énergie était beaucoup plus concrète que la définition que j'en donnais, ce qui confirme que cette notion reste assez complexe à appréhender. A vrai dire je ne faisais que reprendre à mon compte ce qu'a écrit le prix Nobel Richard Feynman "cours de Mécanique 1, p.42 : "Il y a une certaine quantité, que nous appelons énergie, qui ne change pas dans les multiples modifications que peut subir la nature (...) c'est une idée très abstraite car c'est un principe mathématique (...) une quantité numérique qui ne change pas lorsque quelque chose se passe (...) ce n'est pas la description d'un mécanisme ou  de quoi que ce soit de concret ; c'est simplement ce fait étrange que nous puissions calculer un certain nombre et que (...) lorsque nous recalculons ce nombre, il soit le même". Dans son "Lecture on Physics" il ajoute que «il est important de réaliser qu’aujourd’hui, dans la physique moderne, nous n’avons aucune connaissance de ce qu’est l’énergie ». Pour reprendre les propose tenus dans la thèse de Corinne Dalet ("Gestion de l’eau dans un système Pile à Combustible pour traction automobile"), les hypothèses fondamentales de la thermodynamique sont adoptées uniquement parce qu’elles sont vérifiées par toutes nos observations (par exemple l’énergie ne peut être ni créée ni détruite : premier principe de la thermodynamique) bien que personne ne puisse démontrer pourquoi cela devrait être comme ça. A mon sens, cependant, le concept d'énergie est formulé uniquement pour que sa conservation soit vérifiée, par définition de l'énergie. Une énergie qui ne conserverait pas aurait alors aucune utilité physique et on ne l'aurait pas inventé. Le concept d'énergie peut être exploré à partir du document tiré du Bulletin de l'union des physiciens : Quelques remarques et commentaires sur l'enseignement du concept d'énergie.

 

Les  notions  théoriques  de  base  de  la  thermodynamique  sont  la  chaleur,  le travail, la  température, l'énergie interne, l'enthalpie, l'entropie et la réversibilité. Tout le monde utilise des définitions d'énergie mécanique et d'énergie interne différentes (est-ce qu'une énergie potentielle élastique 1/2kx² d'un ressort est une énergie potentielle macroscopique ou microscopique (elle est microscopique en fait si on l'utilise dans le théorème de l'énergie cinétique) ? Ces notions, toutes liées à l'énergie, sont donc fondamentalement abstraites même si les physiciens les utilisent régulièrement sans forcément les définir avec précision (voir la question 2 précédemment abordée). Il n'est donc pas surprenant que les spécialistes utilisent des définitions qui varient selon l'auteur : par exemple le travail est considéré parfois comme l'expression de la variation d'une grandeur extensive du système, et d'autres fois ce n'est pas cas (exemple du "travail de frottement" des forces de viscosité où aucune variable extensive du système n'apparaît). La relation U = 3/2.n.R.T est l'énergie interne d'un gaz parfait monoatomique quand on définit U comme étant l'énergie évaluée dans le référentiel propre (ou barycentrique) du système étudié, et plus précisément, comme étant la somme de l'énergie cinétique désordonnée microscopique des atomes (ou molécules) et de l'énergie potentielle d'interaction entre les atomes (ou molécules) du corps étudié. Dans le gaz parfait, l'énergie potentielle d'interaction est nulle par définition et il reste U = énergie cinétique microscopique, nulle quand T tend vers 0 (plus aucun mouvement ou vibration atomique). Cette dernière définition de U, la plus courante dans la littérature scientifique, n'est curieusement pas celle utilisée par Cengel et Boles.

Est-ce grave pour autant ? Non : ce qui importe est la différence d'énergie interne entre deux états du corps étudié pour évaluer les échanges de travail et de chaleur entre un système et son environnement. Si l'on veut gravir une côte de 100 m, le fait de démarrer à 1000 m d'altitude ou à 1500 m d'altitude ne change rien dans le travail (effort) à fournir, c'est-à-dire dans l'énergie à dépenser pour gravir la côte (pour autant que la densité et la composition de l'air reste constante...). D'une manière générale la valeur d'une énergie dépend souvent du référentiel utilisé pour l'évaluer. Ici l'énergie interne est évaluée dans le référentiel barycentrique de manière à négliger les variations d'énergie cinétique et potentielle macroscopiques. Une énergie est donnée à une constante additive près et les tables de données précisent parfois "l'origine" des énergies tabulées (cela est valable également pour le calcul d'une variation d'entropie). Il faut donc toujours rester attentif aux définitions données afin de ne pas observer de paradoxes. Cela crée d'ailleurs des problèmes de traduction, même avec les ouvrages scientifiques. Ici un document personnel rédigé pour faire une mise au point sur les différentes notions d'énergie : énergie totale, énergie mécanique et énergie interne - 1er principe de la thermodynamique.

09 - Première loi de Joule et détente de Joule

09 - Première loi de Joule et détente de Joule - Gay Lussac

 

La détente de Joule - Gay Lussac est présentée comme suit ("Thermodynamique", Remi Simon, Belin prépas, paragraphe 8.1.) : un système calorifugé et indéformable est constitué de deux récipients reliés par un robinet. Dans le premier compartiment est placé un gaz parfait, le deuxième compartiment est vide. On détent le gaz en ouvrant le robinet. "Puisque la frontière délimitant le système est indéformable et fixe, et parfaitement calorifugée, on a W = 0 et Q = 0. Le premier principe s'écrit donc U2 - U1 = 0 [...]. Pour un gaz parfait, cela implique que T1 = T2, cela constitue la première loi de Joule".

Problème : en quoi U2 - U1 = 0 (ou U1 = U2) implique que T1 = T2 ? En d'autres termes, pourquoi U ne dépend que de T ?

Réponse. La détente de Joule - Gay Lussac est encore malmenée !

En réalité il y a la détente de Gay-Lussac (1806) qui consiste à utiliser des récipients en verre (considérés adiabatiques) et mesurer la température du gaz dans les 2 récipients. Cette détente est différente de la détente de Joule (1845) pour laquelle les récipients sont en métal (donc diathermes) : le système {récipient 1 + récipient 2} non calorifugé est plongé dans l'eau et c'est alors la température de l'eau qui est mesurée : comme elle ne variait pas c'est donc qu'il n'y avait pas de transfert de chaleur Q entre l'eau et le système : Q = 0 n'était pas une contrainte imposée au système (contrairement à la détente de Gay-Lussac) mais une conséquence de la nature du gaz qu'il renferme, avec un gaz réel on aurait eu une variation de la température lors de la détente car Q différent de 0. Donc U2 est différent de U1 pour la détente de Joule d'un gaz réel (il s'en suit, comme on le présente ci-dessous, que U ne dépend pas que de T pour un gaz réel).

Reprenons alors le problème : en quoi U2 = U1 pour une gaz parfait impose T2 = T1 pour la détente de Gay-Lussac ? 

1/ D'une part on a delta U = Q + W = 0 puisque les parois du système sont rigides et calorifugées

2/ D'autre part on a la relation dU = Cv.dT pour un gaz parfait [+ (l - P)dV pour un gaz réel] dans le cas d'une détente réalisée de façon infinitésimale).

On a donc dU = 0, or le coefficient Cv d'un gaz (parfait ou non) est toujours strictement positif : dU = 0 n'est possible qu'avec dT = 0 à tout instant, càd finalement T1 = T2

 

Noter que, bien que cette transformation ne soit pas quasi-statique (au sens "suite continue d'états d'équilibre thermodynamique interne") : on ne peut pas écrire PV = nRT à chaque instant car P et V ne sont pas définis entre les instants initial 1 et final 2), on a tout de même P et V  qui vérifient la relation P1*V1/T1 = P2*V2/T2  ou encore P1*V1 = P2*V2 (puisque T1 = T2) pour les deux états initial 1 et final 2.

Noter également que la détente de Joule impose dU = 0 pour un gaz parfait, c'est-à-dire U = constante pour la détente d'un gaz parfait dans le vide. C'est tout ce que Joule pouvait conclure. En aucun cas cela signifiait que U ne dépend que de T ici (il faudrait pousser le raisonnement).

 

 

 

10 - Notion de gaz

 

A partir de quel moment considère t-on que l'on a un gaz (diazote N2 par exemple) ? En effet, imaginons une enceinte de volume très élevé (volume de la Terre par exemple) et plaçons-y une molécule de diazote : a-t-on un solide, un liquide ou un gaz diazote ? La phase adoptée par un corps pur dépend des interactions (forces de Van Der Waals par exemple) entre les atomes ou molécules de corps. Si on n'a qu'une particule de ce corps dans une enceinte on ne peut pas avoir d'interaction avec une autre particule : on ne pourrait donc pas pouvoir parler d'état ?

Corollaire : si l'on place maintenant deux particules du corps pur dans le volume précédent, peut-on alors préciser la phase (gaz, liquide, solide) du corps ainsi formé ?

 

Réponse. Lorsqu'une seule particule (molécule ou atome de gaz inerte) est présente dans une enceinte, on ne peut pas parler de gaz, de liquide ou de solide. Si l'on en a deux...non plus ! Il faut une certaine quantité minimale de particules pour pouvoir utiliser des outils statistique et parler de "gaz", "liquide" ou "solide". En pratique le nombre de 1000 particules semble être le minimum pour pouvoir utiliser des outils statistiques relativement fiables, donc pour pouvoir parler de comportement de gaz, de liquide ou de solide.

Cela dit, on peut, à la limite, parler de "gaz" quand une seule particule donnée existe dans un volume donné, dans la mesure où il n'y a pas d'interaction particulière de cette particule avec les autres particules éventuellement présentes. Un atome isolé est donc estampillé "gaz" de ce point de vue.

10 - Notion de gaz
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